Quelques heures seulement après le crash d’un jet privé près de Kujenkino, au nord-ouest de Moscou, le 23 août, des chaînes Telegram russophones s’affolent : la liste des sept passagers et des trois membres d’équipage vient d’être publiée par l’agence fédérale de l’aviation. Le nom d’Evgueni Prigojine y est inscrit.
Le chef des mercenaires Wagner n’est pas le seul cadre du groupe enregistré sur ce vol. D’autres personnalités, parfois haut placées au sein de l’organisation, y figurent également. Grâce à des données ouvertes ainsi qu’à des fuites de documents internes à Wagner, Le Monde a pu éclairer le profil de ces passagers.
Evgueni Prigojine
C’est le chef du Groupe Wagner. Après plusieurs années à le nier, Evgueni Prigojine a finalement reconnu en septembre 2022 avoir fondé le groupe de mercenaires, en 2014. Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, en février 2022, il n’a cessé de prendre la parole pour défendre ses hommes, jusqu’à s’opposer ouvertement au ministère de la défense russe.
Le 23 juin, lui et une partie de ses mercenaires se rebellent et prennent la direction de Moscou. La mutinerie, avortée, s’est soldée par l’exil d’une partie de ses troupes en Biélorussie.
Dmitri Outkine
C’est un personnage-clé du système Wagner. Né en juin 1970, cet ancien membre des forces spéciales russes part combattre en Syrie en 2013, avec le Corps slave, un groupe de mercenaires russes. A son retour, il est arrêté avec ses camarades de combat par le FSB, les services de sécurité intérieure : le mercenariat est officiellement interdit par la Russie. Dmitri Outkine échappe à une condamnation en justice.
La suite de son parcours est plus floue : comment, dans quel contexte et pourquoi rencontre-t-il Evgueni Prigojine ? Dès 2014, il commence à diriger des soldats payés par Evgueni Prigojine, d’après Dossier Center, un groupe d’enquêteurs financé par l’homme d’affaires et dissident russe Mikhaïl Khodorkovski. Dmitri Outkine, qui rend compte directement à Evgueni Prigojine, adopte alors son surnom, « Wagner », qui sera bientôt utilisé pour nommer le groupe tout entier. Depuis, le Groupe Wagner n’a cessé d’étendre ses activités en Ukraine, au Moyen-Orient et en Afrique, longtemps avec l’aval et la complicité du Kremlin.
Dans un document interne consulté par Le Monde, Dmitri Outkine, nom de guerre « Neuvième », est listé comme « commandant » d’Evro Polis en 2021, l’entité écran avec laquelle les mercenaires signaient leurs contrats avant de partir en Syrie. Dmitri Outkine est resté jusqu’au bout au cœur de la machine Wagner.
Il vous reste 52.58% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.