La rétention par les autorités du Laos de Lu Siwei, un avocat des droits de l’homme chinois qui avait fui la Chine mais n’y est visé par aucun mandat d’arrêt, place ce petit pays communiste, très dépendant de Pékin, dans une situation délicate. La mobilisation internationale monte en faveur de l’avocat, alors que Vientiane, qui prétend l’avoir arrêté en raison de « documents de voyage frauduleux » au moment où il passait le contrôle d’immigration pour se rendre en Thaïlande, est visiblement sous pression de la Chine pour l’y renvoyer. M. Lu est détenu sans pouvoir communiquer, dans des conditions juridiques incompatibles avec une simple violation des règles de l’immigration.
« Les demandes officielles de ses avocats pour le rencontrer sont restées sans réponse. Le gouvernement laotien a apparemment peur de donner une raison pour justifier que son accès soit bloqué. Ses avocats considèrent que c’est désormais une affaire politique et non juridique. Et qu’elle est directement gérée au plus haut niveau du gouvernement laotien », révèle Peter Dahlin, cofondateur de l’ONG espagnole Safeguard Defenders, qui s’est spécialisé dans les « disparitions forcées » de dissidents organisées par le régime chinois en Chine ou à l’étranger.
Lu Siwei fait partie de ces avocats chinois dans le collimateur du régime de Xi Jinping qui les accuse « d’utiliser le droit à des fins politiques » lorsqu’ils assurent la défense d’opposants au Parti communiste chinois. Dans le cas de M. Lu, il s’agit de la défense d’un des douze protestataires hongkongais interceptés en 2020 par les gardes-côtes chinois alors qu’ils tentaient de gagner clandestinement Taïwan sur une vedette rapide. En représailles, l’avocat a été radié du barreau.
Interdiction de sortie du territoire
En mai 2021, il souhaite partir aux Etats-Unis, qui lui ont accordé une bourse, avec sa femme et sa fille, mais découvre au moment de passer le contrôle de l’immigration chinoise qu’il fait l’objet d’une mesure d’interdiction de sortie du territoire – un autre des outils de la police politique pour contrôler les dissidents. Son épouse et sa fille s’envolent seules aux Etats-Unis.
Deux ans plus tard, en juillet 2023, l’avocat décide de les rejoindre : il sort clandestinement de Chine et passe au Laos, où l’attendent deux membres, de nationalité américaine, de ChinaAid, une ONG chrétienne d’aide aux dissidents chinois. Avec son passeport doté de visas thaïlandais et américain, il est arrêté le 28 juillet non loin de Vientiane, à la gare du train qui franchit le Mékong, la frontière entre le Laos et la Thaïlande. Il est emmené par des policiers malgré les protestations de ses deux compagnons.
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