La lettre de deux pages est adressée à plusieurs institutions parlementaires et organisations internationales, mais c’est en premier lieu la France qui est interpellée. L’ambassadeur de France à Antananarivo, Arnaud Guillois, ne s’y est pas trompé et a été le premier à recevoir, jeudi 2 novembre, une délégation de quatre parlementaires malgaches venus relayer l’inquiétude et l’incompréhension des signataires face au silence de la France devant la crise préélectorale dans laquelle s’enfonce Madagascar.
Faut-il attendre que le sang coule dans les rues d’Antananarivo pour que les gouvernements étrangers sortent de leur réserve et condamnent clairement la manipulation du processus électoral par le président sortant Andry Rajoelina en vue de sa réélection ?, alerte en substance le texte rédigé par des élus représentants le Collectif des 10, rassemblant dix des treize prétendants à la présidentielle, et opposés à la tenue du scrutin le 16 novembre.
« Il s’agit ici d’une crise annoncée, avec les preuves et les signes précurseurs à l’appui. Mais il faut sans doute des morts, que le sang coule, qu’il gicle pour que soit reconnu qu’il y a péril en la demeure ! », dénonce la lettre en appelant au « devoir d’ingérence (…) pour prévenir un conflit ».
« Dans l’impasse »
Depuis le début du mois d’octobre, le Collectif des 10, parmi lesquels les anciens présidents Marc Ravalomanana et Hery Rajaonarimampianina, boycotte la campagne et organise des marches pacifiques, dont plusieurs ont été dispersées à coups de tirs de grenades lacrymogènes. Un des candidats a été blessé à l’œil et se trouve toujours à l’île Maurice où il a dû être évacué pour y être soigné. Si, après les premiers actes de répression, les manifestants se sont tenus à distance de la place du 13-Mai, ils comptent tenter de réinvestir samedi ce lieu symbolique du centre de la capitale, où se sont joués tous les grands tournants de la vie politique du pays.
Les gouvernements étrangers, parmi lesquels la France, qui soutiennent financièrement l’organisation de l’élection, ont jusqu’à présent répondu en des termes jugés trop mesurés face à la gravité de la situation, faisant part dans leur dernier communiqué du 16 octobre de « leur préoccupation à l’égard d’un climat politique tendu » ou de « leurs inquiétudes sur l’usage disproportionné de la force ».
Le même jour, à l’occasion de l’inauguration de la session parlementaire, la présidente de l’Assemblée nationale, Christine Razanamahasoa, pourtant membre du parti présidentiel, faisait le constat d’un « pays dans l’impasse ». Présent parmi d’autres membres du corps diplomatique, Arnaud Guillois, interviewé par des journalistes locaux, avait alors provoqué un trouble en déclarant « prendre note » de la date du 16 novembre pour le premier tour, alors que l’opposition exige un report du scrutin. Les paroles de l’ambassadeur ont été extraites de leur contexte, fait-on valoir de source diplomatique en assurant qu’en aucun cas « elles ne signifiaient validation ».
Il vous reste 50% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.